"C'était un mardi …..
Le jour s'est lévé, il semblait bien vouloir être pareil à ceux que nous vivions depuis près de six ans.
Nous, les enfants, nous entendions les conversations des adultes, et , sans être bien conscients de la gravité de la situation, à travers leurs propos et surtout leurs recommandations, nous ressentions leurs inquiétudes, leurs peurs.
Mais ce jour qui s'était levé semblable aux autres devait s'inscrire pour de longues années dans l'histoire de la France.
C'était le mardi 8 mai 1945 , je venais d'avoir onze ans, nous étions en classe, il devait être environ 15 heures.
Quelqu'un est venu frapper à la porte de la classe, notre institutrice, Madame Cantel a ouvert la porte et l'a refermée sur elle, il y eut un bruit confus de conversation, où se mêlaient des voix d'hommes et de femmes.
Lorsqu'elle revint quelques instants plus tard, nous nous sommes levées comme nous avions l'habitude de le faire quand un adulte entrait dans la classe.
Elle avait le visage marqué par l'émotion, elle nous dit : mes enfants, j'ai une grande nouvelle à vous annoncer :
La Guerre est finie !
Elle ne put retenir plus longtemps ses larmes, son mari était toujours prisonnier en Allemagne.
Il y eut un silence puis, se reprenant, elle ouvrit les trois fenêtres de la classe, les cloches sonnaient à toute volée.
En quelques minutes, les élèves des quatre classes, filles et garçons confondus, se retrouvèrent sur la place, formant une grande ronde autour du marronnier, à laquelle vinrent se joindre spontanément les personnes habitant autour de la place.
Les premiers moments de liesse calmés, un autre impressionnant spectacle, que personne n'a oublié, attira l'attention de tous. Un pontilabien, le menuisier Louis Morissonneau montait à mains nues au clocher, pour faire flotter le drapeau français auprès du coq, tout le monde avait le souffle coupé tant l'exercice était périlleux, mais il y a des instants de grâce et tout se passa bien.
Je voudais terminer, en rendant un hommage à la mémoire de nos instituteurs et institutrices qui nous ont accompagnés, nous, les enfants, durant ces dures années de guerre.
Mademoiselle Marceau,
Mademoiselle Deschamps,
Madame Cantel,
Monsieur Guiet,
Monsieur Amiot,
Nous leur devons beaucoup !"
Mlle Renée BONNET